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Chute de Wall Street : la Silicon Valley percutée par le programme de Donald Trump


La Silicon Valley s’est-elle trompée sur Donald Trump ? Plusieurs déclarations fracassantes de ce dernier étaient du miel à ses oreilles. Son envie de déréguler l’IA. Son désir d’empêcher les Européens de cadrer les risques concurrentiels et informationnels – bien réels – que les plateformes géantes posent. La réalité est moins glamour. Si l’élection a dopé les valeurs technologiques américaines, notamment celles appelées les “7 Magnifiques” (Nvidia, Tesla et les cinq Gafam), l’état de grâce est déjà fini.

Depuis mi-février, le Nasdaq 100 a chuté de 12 %. Les cours du géant Microsoft et du fabricant de puces Nvidia sont plus bas qu’ils ne l’étaient avant l’élection de Donald Trump. Amazon, Alphabet et Tesla ont, quant à eux, retrouvé leur niveau antérieur à l’élection. L’entreprise d’Elon Musk traverse une période particulièrement difficile : les immatriculations annuelles de Tesla en Europe ont baissé de moitié et sa valorisation a été divisée par deux depuis le début de l’année.

Certes, Donald Trump n’est pas le seul responsable de cette baisse. Le spectre d’un ralentissement économique mondial plane sur les marchés. Et les capitalisations boursières des géants du numérique avaient atteint des niveaux excessifs. Mais la tech américaine pâtit aussi de la politique économique de Donald Trump et de son amour immodéré pour les barrières douanières.

“Trump a une vision primitive de l’économie”

“Les entreprises technologiques américaines dépendent fortement de l’Asie, en particulier pour les composants. Cette politique augmente leurs coûts de production et menace leurs marges bénéficiaires”, analyse Andrea Tueni, responsable des activités de marchés de Saxo Bank. Et si le secteur répercute cela sur ses clients, ce sont ses ventes qui risquent alors de fondre.

“Trump a une vision très primitive de l’économie. Il ne comprend pas ce que signifie l’intégration économique, analysait David Frum, l’éditorialiste vedette du magazine The Atlantic dans un long entretien accordé à L’Express. Il imagine que l’économie fonctionne ainsi : on impose une taxe douanière sur les grille-pains, on bloque les grille-pains étrangers, et cela relance aussitôt l’industrie américaine du grille-pain […] En réalité, cela affaiblit systématiquement l’économie en la rendant moins compétitive, comme si on ajoutait une couche de graisse dans chaque fibre musculaire, ce qui ralentit l’ensemble du système et augmente les coûts pour tout le monde.”

Le fait que certaines mesures soient annulées juste après avoir été annoncées donne également un sentiment d’amateurisme peu engageant. Les cas du Mexique et du Canada sont éloquents à cet égard. Le 4 mars, l’administration Trump imposait des droits de douane sur toutes les exportations de ces pays vers les Etats-Unis. Mais dès le jour suivant, elle offrait un sursis d’un mois à la filière automobile. Avant le lendemain d’étendre encore ce sursis à la plupart des secteurs. Comprenne qui pourra. Les marchés, eux, ne goûtent guère ces pirouettes.

Bien sûr, les géants du numérique américains ont les reins solides. Il est cependant ironique de les voir chahutés quand leurs homologues chinois s’épanouissent. Les “Sept Titans” de l’Empire du milieu – Alibaba, JD.com, BYD, Xiaomi, Tencent, NetEase, SMIC – ont grimpé de plus de 40 % depuis le début de l‘année. Et ils séduisent de plus en plus hors de leur juteux marché intérieur. Le constructeur de smartphone Xiaomi, pour ne citer que lui, gagne encore des parts de marché en Inde. Les Européens qui comprennent le danger de leur forte dépendance à la tech américaine pourraient bien être tentés de regarder à l’Est pour diversifier leurs fournisseurs. Auquel cas, Donald Trump aurait réussi le tour de force de pousser un de ses meilleurs clients – 450 millions de consommateurs au pouvoir d’achat confortable – vers son principal ennemi.




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